Câest tendre lâoreille et faire silence pour espérer entendre bruisser les mots alentours. Câest se mettre àson clavier et suer chacun dâeux. Câest se faire surprendre par un jet froid de mots qui débarquent inopinément, en puissance max, se raidir, les considérer dâun air indigné puis se jeter sur son clavier, les attraper au vol, savourer la douche revigorante et en redemander sans que jamais cela ne revienne.
Câest éclater de rire en se relisant, pensant que franchement non il nây a pas moyen. Et publier quand-meme.
Câest se relire la larme àlâÅil, se retourner subrepticement pour sâassurer que personne nous a vus, se donner une petite tape sur lâépaule.
Câest se relire en se disant que jamais au grand jamais on ne serait capable de réécrire ce texte tout en reconnaissant quâil est imparfaitement tissé en purs fils de soi.
Choisir dâécrire câest se faire cueillir au sol par nos personnages et partir en école buissonnière avec eux. Câest explorer des endroits interdits et cachés, écarquiller les yeux, ne pas croire ce quâon voit.
Et câest se retrouver plus bas que terre après avoir plané avec nos protagonistes, le poids de tous ces mots sur les reins.
Câest se dire quâon ne pourra pas le finir, ce truc quâon a commencé. Et dâailleurs mais franchement, quâest-ce qui nous a pris de lâentreprendre, sérieux?!
Câest chaque jour y revenir, en faisant confiance au processus, même quand ça paraît compromis.
Câest un jour le terminer, ce projet, avec tout ce que cela nous offre de légereté ancrée et de pesanteur éthérée.
Câest fermer son cahier et recommencer autre chose.
Choisir dâécrire câest vibrer pour ses personnages, les encourager. Avoir envie de les empaler, de les gommer mais ne pas le faire, de peur quâils ne reviennent, de nuit dans un texte qui nâa rien àvoir, façon Barracuda de lâAgence tous Risques avec un couteau de survie entre les dents, des menottes et une cravache pour nous forcer àécrire .
Câest se rouler dans une piscine de lapins angoras dont les poils sont en musique parlée, lâherbe chatoyante dont ils se repaissent des sensations fraîchement cueillies.
Câest être perturbé par ses textes, leur demander dâoù ils sortent. Devoir parfois les mettre àpied pour souffler après quâils nous ont décroché deux uppercut et un coup de pied en revers, en souriant et sans crier gare.
Câest se dire que ça nous est égal, ces étoiles sur les sites de revue et retourner les compter quand-même.
Câest penser que chaque texte est tout et quâil nâest rien. Tout y mettre et ne rien y mettre.
Et puis choisir dâécrire, ¨câest déjàmettre du noir sur du blanc¨ (S. Mallarmé), chaque jour, parce que câest ce qui nous fait vibrer, ce qui nous fait du bien, ce qui nous rend plus nous, ce qui nous donne un sens.
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Crédit dâimage: Depositphoto